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Raconter le vase de Soissons

Chaque semaine, Entre-Temps accompagne la diffusion du dernier numéro de « Faire l'histoire », le nouveau magazine d'Arte qui raconte l'histoire à partir des objets. L'historien·ne présent·e à l'écran exhume un article, des images, une vidéo pour prolonger l'épisode, plus loin, ou ailleurs. Aujourd'hui, Stéphane Gioanni propose de prolonger son histoire du vase de Soissons par la lecture d'un article de Martin Heinzelmann, paru dans la Bibliothèque de l'école des chartes en 1996, sur « Clovis dans le discours hagiographique du VIe au IXe siècle ».

L’anecdote du vase de Soissons est le premier acte du règne de Clovis. Ce vase légendaire est évoqué pour la première fois par l’évêque Grégoire de Tours qui raconte, près d’un siècle plus tard dans l’Histoire des Francs, que Clovis voulut enfreindre la coutume païenne pour restituer à un évêque un vase liturgique que ses soldats avaient dérobé pendant la bataille de Soissons en 486, dix ans après la chute de l’empire romain d’Occident. Manifestant l’autorité du roi franc et son respect pour l’évêque, ce récit annonce le baptême de Clovis qui fut ainsi considéré comme le fondateur de la monarchie française. Faire l’histoire du vase de Soissons, c’est donc parler d’un des objets les plus célèbres du roman national, mais sans pouvoir l’observer, le toucher, étudier sa matérialité.

Stéphane Gioanni, historien de l’Antiquité tardive et du haut Moyen Âge, raconte que les multiples représentations du vase de Soissons permettent de parcourir des moments charnières de l’histoire politique et de rendre intelligible le mythe de Clovis, objet de communion et de division nationales. Il propose, sur Entre-Temps, de prolonger cette histoire par la lecture d’un article de Martin Heinzelmann, paru dans la Bibliothèque de l’école des chartes en 1996, sur « Clovis dans le discours hagiographique du VIe au IXe siècle ».

Dans cette étude, l’historien allemand retrace l’évolution du mythe de Clovis dans les sources narratives du haut Moyen Âge. Montrant le rôle essentiel du discours hagiographique dans l’écriture de l’histoire au VIe siècle, il nous explique comment le premier historien des Francs a pensé et composé son chef-d’œuvre. Il interroge notamment les fonctions spirituelles du récit de Grégoire de Tours qui fut le premier à raconter le règne de Clovis auquel les contemporains n’avaient guère prêté attention. Ce texte fondateur, qui est à l’origine du mythe de Clovis, est totalement subordonné aux desseins de Grégoire de Tours qui construit une figure stylisée de Clovis en tant que membre élu de l’Église du Christ. Comme tout ce qui touche au règne de Clovis, le vase de Soissons devint ainsi le réceptacle des représentations les plus diverses qui comblèrent le silence des sources et favorisèrent de nombreuses instrumentalisations depuis l’époque mérovingienne jusqu’à l’époque contemporaine.

Lire l’article de Martin Heinzelmann, « Clovis dans le discours hagiographique du VIe au IXe siècle », in Bibliothèque de l’école des chartes, 1996, 154, p. 87-112 sur Persée.

Découvrir aussi « Pourquoi faire l’histoire du vase de Soissons ? », l’entretien donné par Stéphane Gioanni au magazine L’Histoire.

 

 

Publié le 3 mai 2022
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