Archives familiales et naissance d’un imaginaire : quand Lorient célébrait la Révolution
A l’occasion de la sortie du deuxième tome de la bande dessinée Révolution de Younn Locard et Florent Grouazel, ce dernier transmet à Entre-Temps l’une de ses archives familiales : les photographies des commémorations du Bicentenaire de la Révolution organisées à Lorient, sa ville natale, en 1989. Un grand spectacle de rue est monté pour l’occasion, dans lequel jouent les parents de Florent Grouazel. Il a alors deux ans, et s’il ne se souvient pas du spectacle ni de ses préparatifs, les souvenirs racontés et les photographies ont nourri son imaginaire de la Révolution.
Le premier tome de la bande-dessinée Révolution avait fait l’objet de deux entretiens menés avec les auteurs et disponibles sur Entre-Temps.
Le programme des célébrations affiche d’emblée la couleur (Figures 2 et 3). Si Paris a son grand défilé organisé par le photographe et metteur en scène Jean-Paul Goude (une section de l’exposition Années 80. Mode, design et graphisme en France du musée des Arts Décoratifs de Paris y est d’ailleurs consacrée), Lorient a aussi son « grand spectacle multimédia ».
Les célébrations s’organisent en deux temps : des cortèges, dont un de « 2000 judokas en bonnets phrygiens », puis un « spectacle de rue itinérant » mettant en scène la ville de Lorient dans la Révolution. C’est à ce spectacle de reconstitution historique que les parents de Florent Grouazel ont participé, et qu’ils ont raconté à leur fils. On reconnaîtra d’ailleurs sa mère dans la jeune femme surplombant la foule, avec son bonnet blanc et son fichu d’indienne croisé sur les épaules (Figure 4) – photographie à laquelle les deux auteurs de Révolution font un clin d’œil à la fin de leur bande dessinée (Figure 5, © Actes Sud, 2023).
De cette ambitieuse célébration – on notera la présence de comédiens professionnels comme amateurs (cheval compris) et la qualité des costumes (Figures 6, 7, 8) – il reste donc des intentions et des images fortes, l’idée de mettre en scène un héritage révolutionnaire à la fois universel et lorientais, et des souvenirs transmis, assimilés puis transformés par les générations. Car ces photographies, comme les deux tomes de Révolution, témoignent bien d’une chose : l’évènement fascine toujours autant et le message de la Révolution est loin de perdre son actualité.