La mer d’Azov, portrait historique
À partir de demain, 5 octobre, et jusqu'à dimanche, 9 octobre, se tiendra la 25e édition des Rendez-vous de l’histoire de Blois, consacré au thème de La mer. La revue Entre-Temps y sera pour proposer une performance donnant à voir et à comprendre notre manière de rendre l’histoire vivante, notamment à travers la réactivation des archives. Ce sera samedi 8 octobre, à 18h, dans l'Auditorium du Conservatoire de musique, sur les murs duquel nous tenterons de dresser un portrait historique de la mer d'Azov.
Quand la guerre revient, on déplie les cartes. Des noms y surgissent à nouveau, certains chargés d’histoire, d’autres nimbés d’oubli. Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie de Poutine le 24 février 2022, Odessa, Marioupol et la péninsule de Crimée se rappellent à notre bon souvenir, mais qui se souciaient vraiment de Berdiansk et du détroit de Kertch ? Sur les plateaux télévisés, quelques experts nous livrent, en accéléré, des cours de rattrapage sur la géopolitique des détroits et des mers intercontinentales. Des cartes s’animent dans leur dos, où les massacres, les bombardements et la souffrance des populations déplacées se convertissent en aplats de couleur. On y voit la mer d’Azov, bordée par la presqu’île de Crimée et la péninsule de Taman au sud, par la Russie à l’est, par l’Ukraine à l’ouest et au nord, devenir progressivement un lac russe.
Du 5 au 9 octobre 2022 se tiendra la 25e édition des Rendez-vous de l’histoire de Blois, consacré au thème de La mer. Comme tous les ans, la revue Entre-Temps s’y rendra pour y proposer une performance donnant à voir et à comprendre notre manière de rendre l’histoire vivante, notamment à travers la réactivation des archives, comme mise en puissance de l’intelligibilité du passé, mais aussi de notre capacité à l’imaginer aujourd’hui. Mais aujourd’hui, justement, l’actualité nous requiert et nous oblige. Et pourquoi ne pas se donner, comme un défi, la promesse d’un lointain — cet espace dont nous ne savons pas grand-chose, pourquoi le nier, mais que la violence du monde rapproche de nous : la mer d’Azov ?
Ce n’est pas un jeu, ou alors il est grave et sérieux comme un jeu d’enfant. C’est une tentative, qu’ensemble nous vous proposons, confiants dans le fait que l’histoire ne s’affaiblit jamais en exposant ses hésitations et ses incertitudes. Il s’agit de faire comprendre ce que nous voulons, en convoquant ainsi la mémoire et les savoirs, les images et la littérature, les œuvres d’imagination et les archives historiques : non pas raconter une autre histoire, en cherchant à brouiller les cartes du réel et de la fiction, mais au contraire raconter autrement la même histoire, en brossant collectivement une seule carte, plus ressemblante et plus profonde, afin de combler les blancs de la conscience européenne.
Voici donc ce que nous allons vous proposer, le samedi 8 octobre 2022 à 18 heures, dans l’Auditorium du Conservatoire de musique de Blois, en compagnie de Marie-Laure Archambault-Küch, Philippe Artières, Clément Fabre, Louise Gentil, Pauline Guillemet et Meryl Lavenant : dresser collectivement, en historiennes et en historiens, le portrait d’une mer, la mer d’Azov. Ne comptez pas sur nous pour nous laisser aveugler par l’arrogance du présent : nous parlerons des cartes anciennes, celle de Strabon et d’Ibn Bâttuta, nous parlerons d’archéologie sous-marine et d’esturgeons, des Amazones et des Russes en vacances, de mythes anciens et de circulations nouvelles. Mais ne comptez pas sur nous non plus pour nous divertir de la brutalité de la guerre : faire le portrait historique de la mer d’Azov, c’est travailler encore à être contemporains.