"Face aux questions sans réponse, le désir de mémoire et d’imaginaire est puissant." Entretien avec François-Xavier Destors et Marie Thomas-Penette, à propos de "Thiaroye 44"
Comment raconter l'histoire d'un massacre perpétré il y a 80 ans par l'armée française dans la banlieue de Dakar, quand, pendant 80 ans ou presque, cette histoire a été tue, confisquée ? Avec Rémy Besson, François-Xavier Destors et Marie Thomas-Penette reviennent sur la réalisation de leur film documentaire Thiaroye 44 et sur leur choix : suivre l'enquête menée par trois ami·e·s artistes, dans un dialogue constant entre histoire, mémoire et création.
Rémy Besson : Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots sur quel événement historique porte votre documentaire ?
François-Xavier Destors & Marie Thomas-Penette : Notre documentaire évoque un crime de masse commis en 1944 par l’armée française contre des tirailleurs dits « sénégalais », sans sommation et à la mitrailleuse, « en tirant dans le tas ». Un massacre qui a été maquillé en mutinerie par l’armée et qui demeure, jusqu’à aujourd’hui, une plaie majeure de l’histoire coloniale française. On peut parler d’un mensonge d’État.
En novembre 1944, la Seconde Guerre mondiale touche à sa fin mais la France n’est pas encore officiellement dans le camp des vainqueurs. Des tirailleurs africains sont rapatriés par l’armée française à Thiaroye, un camp militaire de la banlieue de Dakar. Il s’agit du premier contingent de retour du front, et pour beaucoup après des années de captivité voire de résistance. Depuis leur embarquement à Morlaix pour Dakar où ils doivent être démobilisés, les tirailleurs réclament le paiement de leur solde. Or, le 1er décembre à l’aube, des coups de feu éclatent dans le camp, des morts, des blessés sont transportés à l’hôpital. L’armée française, qui fait arrêter et juger une partie des survivants, évoque un acte de mutinerie qu’elle n’a eu d’autre choix que de réprimer dans le sang. Selon elle, ces anciens prisonniers de guerre, conditionnés par la propagande allemande, les communistes et les marraines de guerre en France, ne répondaient plus aux ordres. Peut-être souhaitaient-ils marcher sur Dakar ? C’est la version officielle qu’imposent les autorités militaires pour justifier cet acte barbare.
En France, « l’affaire » est étouffée. Sur le continent africain, l’évènement revêt une importance symbolique capitale. Sa portée atteint dès 1945 l’ensemble des pays de l’ancienne AOF d’où provenaient les tirailleurs. Au Mali, au Tchad, au Burkina-Faso et jusqu’en Algérie, les événements de Thiaroye sèment les graines de la contestation jusqu’aux indépendances. Pour beaucoup, il ne s’agit pas d’une mutinerie mais bien d’un massacre colonial, l’un des plus grands crimes de masse de l’histoire du Sénégal contemporain, et le premier d’une longue série commise par l’armée française à l’issue de la Seconde Guerre mondiale : Sétif, Madagascar, Côte d’Ivoire, Cameroun, parce que la France estimait ne plus avoir besoin de ses « troupes de couleur », parce qu’il fallait les exclure du récit national, restaurer l’ordre colonial, au mépris de ses valeurs et de ses promesses d’égalité.
80 ans plus tard, on ne sait toujours pas combien d’hommes sont tombés sous les balles françaises, on ne connait ni leurs noms ni où ils sont enterrés. Les mensonges de l’armée française perdurent, les archives militaires sont parcellaires et caviardées, et malgré la venue du président François Hollande en 2014 au cimetière de Thiaroye, où il avait reconnu une « répression sanglante » et promis le rapatriement de toutes les archives, tous ceux qui recherchent la vérité sur ce crime sans images tombé dans l’oubli se heurtent encore à un silence assourdissant.
R. B. : Ce sujet a déjà donné lieu à un film de fiction, Camp de Thiaroye (1988) tourné par un réalisateur sénégalais, Ousmane Sembène. Votre point de vue est tout à la fois différent et complémentaire vis-à-vis de cette œuvre fondatrice de la mémoire collective de Thiaroye. Pouvez-vous nous dire si ce film vous a servi de point de référence et/ou si vous vous êtes positionné.es vis-à-vis de ce dernier pour développer votre propre approche?
F-X. D. & M. T-P. : Le film d’Ousmane Sembène et de Thierny Faty Sow occupe une place à part dans le corpus des œuvres qui ont émergé autour de la mémoire de Thiaroye et qui ont permis de façonner un imaginaire politique autour des événements. On pourrait citer d’autres œuvres artistiques tout aussi inspirantes telles les pièces de théâtre populaire Aube africaine (1965) de Fodeba Keita, Aube de Sang (1977) de Cheikh Faty Faye et Thiaroye terre rouge (1981) de Boubacar Boris Diop. Elles sont portées par un vent de contestation syndicale et politique au régime de Senghor à qui l’on reprochait d’avoir permis que le drame s’efface de l’espace public. Au Sénégal, Camp de Thiaroye est la seule à conquérir un large public et dans ce sens le film a véritablement inscrit le souvenir de la répression dans la mémoire collective. D’ailleurs il est souvent projeté à Thiaroye même, auprès des habitants et des écoliers qui l’exploitent toujours dans leurs projets artistiques et commémoratifs locaux. Nous le dévoilons dans notre documentaire en filmant ces jeunes qui reconstituent des scènes qui font appel au même imaginaire. En France, par contre, malgré des prix prestigieux comme la Mostra de Venise ou le Fespaco, la distribution du film a clairement fait l’objet d’une forme de censure, ce qui est assez révélateur des fractures mémorielles entre la France et ses anciennes colonies. Ce film a le grand mérite d’affirmer que la tuerie qui s’est produite n’est pas le fruit des circonstances, mais qu’elle s’explique par une situation historique où le racisme présent au sein des rangs de l’armée française autorise le passage à l’acte. C’est fondamental, et à ce titre c’était évidemment un socle pour toutes celles et ceux qui ont participé au documentaire.
Au-delà des images de ce film, le seul à ce jour à avoir osé mettre les événements en fiction, un autre scénario du début des années 1980 nous a aussi interpellé. Un scénario qui devait être l’adaptation de Thiaroye terre rouge par Boubacar Boris Diop et le réalisateur Ben Diogaye Beye mais qui n’a finalement jamais été tourné, jugé moins raisonnable que celui de Sembène par les autorités cinématographiques (Thiaroye 44, scénario inédit, Ben Diogaye Beye et Boubacar Boris Diop, Collection Autrement Mêmes, 2018. L’historien Martin Mourre raconte dans sa préface au scénario le « scandale » qu’a provoqué l’arrêt brutal du financement du film pour favoriser celui de Sembène). Ce qui nous a intéressé, ce sont les enquêtes qu’a menées Mansour Kébé dans les années 1970 pour ce film. Ancien syndicaliste et militant politique – il était l’un des principaux animateurs du Front culturel, qui réunissait clandestinement des hommes de culture dont les organisations étaient interdites –, Mansour Kébé a fouillé dans les fonds des Archives nationales du Sénégal, s’est entretenu avec plusieurs historiens sénégalais, a enquêté dans le village de Thiaroye et d’autres quartiers de l’agglomération dakaroise, à la recherche de toutes les traces visuelles et de tous les témoignages possibles. Même si ce travail d’enquête orale réalisé 30 ans après pouvait souffrir du passage du temps, cette approche a permis d’éclairer le regard que nous pouvions porter sur l’événement.
R. B. : Ce qui est particulièrement intéressant dans votre démarche, c’est que vous vous intéressez tout à la fois aux faits historiques et à leur place dans les sociétés sénégalaise et française contemporaines. Cela vous conduit à aborder le temps des commémorations. Est-ce que cela faisait partie de votre sujet dès le départ?
F-X. D. & M. T-P. : Lorsque nous avons commencé à travailler sur ce film, en 2014, nous venions d’achever un long-métrage documentaire au Rwanda (La Surface de Réparation, Arte France). La mémoire de Thiaroye, 70 ans après à l’époque, s’était enfin invitée dans l’actualité : François Hollande avait choisi le petit cimetière militaire de Thiaroye pour son premier voyage officiel en terre africaine. Son discours avait fait l’effet d’une bombe : « une répression sanglante », avait-il affirmé. Pour la première fois, la version officielle de l’histoire des événements de Thiaroye était remise en question. Jusqu’ici, « l’affaire de Thiaroye » était considérée comme une « rébellion lourdement armée et une prise d’otage » ayant nécessité une « riposte » au bilan funeste de 35 morts et 35 blessés. Le président français avait promis, main dans la main avec son homologue sénégalais Macky Sall de faire enfin la lumière sur cet « événement insupportable ». Il n’en a rien été. Rien n’a filtré de ces archives et personne ne s’en étonne. À quelques exceptions notables, les élites politiques et scientifiques semblent, au Sénégal comme en France, avoir tourné la page. Les commémorations officielles au Sénégal ont été très limitées ces dernières années et souvent noyées dans la glorification plus globale des tirailleurs ; et en France, elles sont inexistantes. Comme si la mémoire de ces soldats était toujours enfouie, voire dissimulée, dans des rapports de domination qui perdurent.
Le seul endroit où nous avons ressenti la mémoire vive de Thiaroye, c’est sur les lieux du crime, et c’est là que s’ancre le film. Les traces y sont éparses : quelques ruines du camp colonial, des fresques murales avec des portraits de tirailleurs, un cimetière militaire aux tombes vides au bord d’une gigantesque autoroute récemment construite par l’entreprise française Eiffage (dont certains disent qu’elle recouvrirait les fosses communes où ont été jetés les corps), les écoles des « Martyrs » où les jeunes retrouvent parfois des douilles ou des plaques militaires. Nous avons noué des liens avec des jeunes artistes qui font vivre cette mémoire par le théâtre, le rap ou les arts urbains, comme par exemple le groupe BMG 44 du musicien Matador. Ce sont eux qui malgré un manque évident de moyens l’ont maintenue en vie, au fil du temps, en organisant au centre culturel de Thiaroye des manifestations bien plus importantes que les rares initiatives officielles.
Nous cultivons l’espoir que la rupture provoquée par l’élection récente du président Bassirou Diomaye Faye crée une nouvelle impulsion politique, particulièrement en cette année 2024 où nous célébrons les 80 ans des événements de Thiaroye.
R. B. : Au-delà des commémorations officielles et de la parole des hommes politiques, vous donnez aussi à entendre le point de vue des témoins. Plus précisément, vous avez mené un entretien avec Biram Senghor, fils d’un tirailleur tué le 1er décembre 1944, et avec Adolf Saer Gueye, un sénégalais engagé dans l’armée française, qui se trouvait non loin des lieux au moment où le massacre s’est déroulé. Pouvez-vous nous expliquer ces choix?
F-X. D. & M. T-P. : Les témoignages directs de cette histoire sont très rares, voire inexistants. Certains historiens acharnés comme Armelle Mabon (Le massacre de Thiaroye. Histoire d’un mensonge d’État, à paraître en 2024) ou Martin Mourre (ce dernier a notamment publié Thiaroye 1944. Histoire et mémoire d’un massacre colonial aux PUR en 2017) les ont cherchés pendant des années. Il y a eu un témoignage d’importance, celui de Doudou Diallo, ancien maréchal des logis, qui a publié un court texte dans la revue Afrique-Histoire en 1983, soit près de 40 ans après les faits. Son histoire, que nous racontons brièvement dans le film, est révélatrice : prisonnier de guerre, il s’est évadé des Frontstalags pour entrer en résistance. Avant son retour à Dakar, il noue une relation amoureuse avec une marraine de guerre avec laquelle il a une petite fille, Maïté, qui vit toujours en France. Le 1er décembre 1944, il rentre au camp après avoir passé la nuit à Dakar : il n’était donc pas présent lors de la fusillade, mais il est quand même arrêté, accusé d’en être l’un des meneurs, dégradé et condamné à 18 mois de prison. Dans son court texte, il fait surtout part de son écœurement vis-à-vis de l’armée française.
Les recherches de ces historiens se sont naturellement portées sur les descendants des victimes. Là encore avec des difficultés majeures, puisque nous ne disposons pas des noms de toutes les victimes, qui venaient de tous les pays de l’ancienne AOF. Biram Senghor est l’un de ces descendants. Il était encore tout petit quand son père, M’Bap, a rejoint le 6e RAC en 1939. Ce dernier n’est jamais revenu. Biram se souvient qu’un officier est venu leur apporter la nouvelle au village. Depuis les années 1970, il réclame des explications sur la mort de son père. Il a écrit aux présidents Mitterrand, Chirac, Sarkozy, Hollande et Macron, a entamé des procédures au tribunal administratif de Paris jusqu’à la CEDH pour qu’on reconnaisse que son père est « mort pour la France », pour qu’on exhume son corps, qu’on rétablisse la justice et l’honneur. En vain. La parole de Biram devait être au cœur du documentaire, c’était une évidence pour nous.
Adolphe Saer Gueye n’est pas non plus un témoin direct, mais il était à la gare de Thiaroye lorsque les coups de feu ont été tirés. Ses souvenirs sont ceux d’un enfant. Cela ne l’a pas empêché de s’engager à 18 ans. Son témoignage est précieux parce qu’il incarne la continuité de l’injustice de Thiaroye : malgré deux longs séjours en Indochine puis en Algérie, il a subi le racisme au sein de l’armée française, n’a jamais été promu, et lorsqu’il nous reçoit, aveugle et quasi sourd à 95 ans, sa pension est dérisoire par rapport à ce que touchent les officiers français qu’il a lui-même formés. Grâce à l’entremise de l’historien Martin Mourre, sa parole a pu être enfin entendue.
La rencontre de Dialo Diop, médecin biologiste, figure majeure du militantisme sénégalais – il a été emprisonné à 19 ans suite aux attentats commis à Dakar lors de la venue de Georges Pompidou en 1971 –, déplace effectivement la problématique sur le terrain intellectuel et politique. À l’époque du tournage, Dialo était secrétaire du Rassemblement national démocratique (RND), un parti politique se réclamant du panafricanisme qui ne cesse de demander l’exhumation des corps. Il était crucial pour nous de montrer que la lutte pour la vérité existe aussi sur ce plan-là. La donne politique a changé depuis au Sénégal, et il y a bon espoir qu’elle facilite enfin la prise en compte de ces revendications.
Toutes les personnes que nos trois jeunes artistes rencontrent sont en quelque sorte les derniers acteurs de la mémoire du massacre de Thiaroye. Elles restaurent le fil d’une transmission maintes fois interrompue.
R. B. : Mais votre film n’est pas uniquement centré sur la mémoire. En effet, vous donnez aussi la parole à un historien, spécialiste de Thiaroye, Martin Mourre. Ce dernier n’est pas filmé à la manière d’un expert qui partage ses connaissances sur le sujet (on pense ici au format des « têtes parlantes » devant une bibliothèque ou une toile de fond de couleur sombre). Il est impliqué dans la réalisation d’un véritable dispositif filmique qui le conduit à dialoguer avec les protagonistes du film. Pouvez-vous nous en dire plus sur sa fonction dans le documentaire?
F-X. D. & M. T-P. : L’affaire de Thiaroye divise les historiens. Certains, qui ne cachent pas leurs accointances avec l’armée, continuent de propager la version de la mutinerie. D’autres s’emploient à la dénoncer en mettant en avant le fait que les documents relatifs au massacre, quand ils ne sont pas « perdus » ou « mal inventoriés », comportent des faux en écriture publique, comme le dénonce Armelle Mabon. L’historienne bretonne se bat depuis des années aux côtés des descendants des tirailleurs pour obtenir la révision du procès et exhumer les corps des fosses communes. Installé à Dakar, docteur en histoire de l’EHESS et en anthropologie de l’Université de Montréal, Martin Mourre dénonce aussi une « fraude à grande échelle ». Leurs démarches respectives forment le terreau de nos questionnements. Armelle Mabon a été notre conseillère historique, et Martin l’un de nos principaux protagonistes. Il appartient à cette génération qui renouvelle l’historiographie de Thiaroye.
Nous ne voulions pas d’un film d’histoire au sens classique du terme, avec des entretiens d’historiens filmés de manière frontale. Ce film n’aurait probablement pas servi notre propos. Nous voulions que le film s’ancre plutôt dans la transmission, que les questionnements historiques émergent dans les discussions avec nos jeunes artistes ou dans la confrontation de l’historien avec les témoins comme Adolphe Saer Gueye. D’où la mise en place d’un dispositif spécifique, ancré sur les lieux-mêmes du massacre, qui s’est révélé plus dynamique, plus humain aussi, car il a permis aussi de montrer que l’historien qui se confronte à cette histoire fait face à ses propres limites. L’histoire de Thiaroye n’est pas enseignée à l’école, les manuels l’éludent. Nos jeunes protagonistes mènent donc l’enquête avec Martin qui les exhorte à comprendre, à entrer dans les détails et les profondeurs de cette histoire qui leur a été confisquée.
R. B. : L’historien est aussi celui qui montre et met en perspective les documents archives?
F-X. D. & M. T-P. : Oui. Ce dispositif central pour le récit nous permet de mettre en avant, documents à l’appui, l’interprétation directe de l’historien et de la soumettre à celles et ceux qui cherchent à comprendre. Il nous permet de mettre en perspective toutes les archives, qu’il s’agisse des rapports militaires, des discours politiques, et bien évidemment la source la plus précieuse pour exprimer le point de vue des tirailleurs, à savoir les différents procès-verbaux d’interrogatoire présents dans les sources judiciaires.
R. B. : Enfin, vous portez tout au long du film une attention toute particulière aux gestes créateurs de jeunes sénégalais·e·s qui font du théâtre et du rap à propos du massacre de Thiaroye en décembre 1944 ? Il semble que c’est dans la vitalité de ces pratiques culturelles que vous trouvez une réponse au silence officiel qui a longtemps entouré le massacre.
F-X. D. & M. T-P. : Comme l’écrivait Boubacar Boris Diop qui citait Barbey d’Aurevilly en incipit de son récit, « là où les historiens s’arrêtent ne sachant plus rien, les poètes apparaissent et devinent ». Lorsqu’on s’attaque à Thiaroye, on ne trouve que des béances et des fragments de vérité. Face aux vides de l’histoire, aux questions sans réponse, le désir de mémoire et d’imaginaire est puissant. C’est aussi ce qu’il nous reste pour continuer à faire vivre cette histoire partagée. Le désir de ce film a émergé auprès de ces jeunes qui ressentent le poids de cette histoire et l’inscrivent comme nous dans une démarche artistique. Il s’est cristallisé autour de la rencontre d’Aïcha Euzet, une jeune dramaturge qui a grandi à Thiaroye avec ses parents français. Aïcha y retourne pour l’écriture d’une pièce de théâtre consacrée à ces évènements qui l’obsèdent depuis son enfance. Elle y retrouve deux amis sénégalais, Magui et Babacar, artistes engagés, pour retisser l’histoire.
Ensemble, et chacun dans leur cheminement artistique, ils perpétuent à leur tour cette longue tradition culturelle – par le rap, le graffiti, le théâtre ou le cinéma – qui permet à la mémoire de Thiaroye de survivre encore aujourd’hui dans les consciences collectives. Cette génération se demande pourquoi elle devrait encore se taire. Thiaroye 44 est quelque part le slogan qui incarne à ses yeux toutes les luttes anti-impérialistes. Notre intention première a dès lors été de tisser un dialogue continu entre l’histoire et la mémoire, rythmé par leurs interrogations et leurs performances artistiques.